Perspectives 2023 concernant le marché de l’emploi pour un développeur web, avec Jerry Dumont

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Lesdevjuniors

 

En ce début d’année 2023, le moment du bilan est arrivé ! Que doit on retenir de l’année 2022 concernant le monde du développement web ? Quelles perspectives pour l’année 2023 ? Que dire / conseiller à une personne souhaitant devenir développeur web en 2023 ? Comment se porte le marché de l’emploi pour un développeur web en 2023 ? Pour parler de tout cela, j’ai décidé de faire appel à une personne avec qui je m’étais déjà entretenu précédemment, et qui a toujours énormément d’informations passionnantes à me livrer : Jerry d’Iters.io. Professionnel du monde du web au sens large, actuellement responsable du recrutement au sein de la Wild Code School, il nous donne son point de vue de façon cash et transparente.

 

Tout d’abord, quel bilan dresses-tu concernant l’année 2022 ? Il y a t il eu des évolutions / phénomènes marquants durant cette année concernant le monde du développement web ?

Il y a deux aspects dont on peut parler : le coté technique, et le marché de l’emploi.

Coté technique, Benjamin Code a récemment sorti une vidéo qui résume bien la situation actuelle, à savoir le fait que le JavaScript est, selon moi, en train de perturber le marché du web. La surenchère technologique qui a lieu dans l’univers JavaScript, avec toujours plus de nouveaux frameworks et librairies, a un impact sur l’ensemble du marché. Cette tendance, dans le domaine de la technique, à des conséquences sur le domaine du marché de l’emploi. On voit aujourd’hui des offres d’emploi ou la liste des compétences demandées à un développeur est impressionnante, pour ne pas dire irréaliste. On leur demande même d’avoir des compétences qui se trouvent en dehors de ce qu’est censé être leur métier. A titre d’exemple, il est fréquent de voir qu’on demande aux développeurs backend d’avoir désormais des compétences en AWS ou Kubernetes. Hors, ce n’est pas à eux de s’occuper de ce genre de choses. Donc, tout cela ne va, selon moi, pas dans le bon sens. Et je pense vraiment que c’est la sphère JavaScript qui est à l’origine de cette dynamique. Car si on regarde les autres technos, on ne constate pas ces excès.

 

Quels conseils donnerais-tu à une personne qui souhaite devenir développeur web en 2023 ?

Avant tout, si l’on veut faire un état des lieux de la popularité des différentes technos, nous devons préciser que :

  • coté frontend : React prend de plus en plus le dessus sur les autres frameworks frontend (environ 60% du marché). Beaucoup de développeurs Angular se reconvertissent désormais sur React pour pouvoir trouver des missions ou un emploi.
  • coté backend : les 3 langages pour lesquels il y a le plus de demande sont PHP, Java et .NET. Malgré la “hype” dont il bénéficie depuis des années, Node reste, dans les faits, moins utilisé. La majorité des formations au métier de développeur propose des cursus Node, mais en réalité, sur le marché, les offres d’emploi pour des développeurs junior Node ne sont pas nécessairement les plus répandues, ce qui crée un décalage.

Une fois ces informations rappelées, quel conseil donner à une personne qui souhaite devenir développeur web en 2023 ? Je vais ici m’adresser précisément à ceux qui effectuent une reconversion: faites en sorte de passer par un POEI ou POEC .Ces dispositifs donnent de vraies garanties quant au fait de décrocher un emploi en sortie de formation. Et c’est très important d’avoir des garanties de nos jours…

 

Justement, à ce propos, quel constat établir concernant le marché du travail pour un développeur web en 2023 ? Il y a t il une évolution concernant l’intégration des développeurs reconvertis sur ce marché ?

L’embouteillage à l’entrée du marché, concernant les profils junior, déjà constaté depuis quelques années, s’est, à mon avis, empiré en 2022. Vu la situation économique actuelle (inflation importante, budgets plus serrés pour de nombreuses entreprises…), les employeurs cherchent à recruter des profils qui vont pouvoir être le plus productifs possibles. Le marché du travail pour un développeur web en 2023 propose de moins en moins d’offres d’emploi pour les profils ayant moins de trois ans d’expérience. Et c’est problématique.

Il ne faut pas non plus voir tout en noir pour autant. Le problème vient du fait que les écoles acceptent trop de monde. Le filtrage est trop faible. Du coup, chaque année, des milliers de “nouveaux développeurs” sortent d’école, et parmi eux se trouvent des profils qui ne sont pas réellement adaptés au métier de développeur.

Pour les autres, ceux qui sont faits pour ça, réellement intéressés, et qui sont bons dans ce qu’ils font, il y a toujours de la place. J’ajouterai aussi que, pour tout ceux qui sont titulaires d’un master en sciences par exemple, l’intégration au marché est moins périlleuse. Le problème vient du fait que, parmi les reconvertis, beaucoup sont des personnes qui n’ont pas eu un long parcours scolaire (c’est justement mon cas, donc il n’y a aucun jugement dans ce que je dis ici). Hors, le métier de développeur a justement un aspect “scolaire” dans une certaine mesure, car il faut toujours apprendre de nouvelles choses. Donc, pour une partie d’entre eux, le rythme est compliqué à suivre.

Quel conseil donner à une personne qui souhaite devenir développeur web en 2023 ? […] pour ceux qui effectuent une reconversion: faites en sorte de passer par un POEI ou POEC .

J’ai cru comprendre qu’il y avait de plus en plus d’anciens salariés qui se mettent en freelance depuis le Covid. En 2023, quel statut te semble le plus porteur et intéressant pour un développeur web: salarié ou freelance ?

Personnellement, j’ai tout d’abord constaté le phénomène inverse, pendant le Covid. De nombreux freelances ont pris un peu peur et, ayant moins confiance en l’avenir, sont allé chercher de la sécurité dans un CDI. Par la suite, quand la vie a “repris son cours”, de nombreux développeurs se sont en effet mis en freelance. A voir comment cela va évoluer. Je ne suis pas sur que cette tendance soit durable.

Avec la dégradation de la situation économique qui va certainement se poursuivre en 2023, la stabilité et la sécurité offertes par un CDI vont certainement prendre de plus en plus de valeur aux yeux de nombreux développeurs. Pour ma part, en ce début 2023, je ne conseillerai pas du tout à un développeur de lâcher son emploi pour se mettre en freelance. Ces derniers mois, j’ai de nombreux développeurs freelance qui m’ont contacté pour savoir si je n’avais pas des missions à leur proposer. J’en avais très peu auparavant. Ce n’est que mon retour personnel, et ça n’empêche pas qu’il y ait encore de nombreux développeurs freelance pour qui tout se passe bien, mais je pense malgré tout que tout cela n’est pas anodin.

 

On a récemment tous entendu parler du phénomène ChatGPT…quel regard portes tu là- dessus et sur l’impact que cela pourrait avoir sur le métier de développeur web à termes ?

Ah oui ! C’est en effet le grand sujet du moment ! Et bien, mon avis est le suivant : les débats autour de ChatGPT me rappellent ceux qui avaient cours lors de l’arrivée des frameworks, des CMS, ou encore du No-Code… La réalité est que ces innovations peuvent avoir une grande utilité, nous faire gagner beaucoup de temps, nous permettre d’être plus performants, etc. Mais a chaque fois que ce genre d’innovation arrive, parallèlement, le métier de développeur se complexifie. On se sert de ces innovations pour passer un step dans cette surenchère de complexification progressive. Donc au final, ce qui devait être un “super truc” qui allait nous permettre de tout faire deux fois plus vite…fini par ne avoir une utilité et un rendement différents de ce qu’on imaginait.

Cette complexification constante, je dois avouer que j’ai du mal à la comprendre. Pour moi, le métier de développeur n’a pas à être si complexe que ce qu’il est devenu de nos jours. Quand je vois ce qui est demandé à un développeur lambda aujourd’hui en termes de compétences, ça me semble délirant. C’est la raison pour laquelle je suis persuadé, comme je l’avais dit dans notre précédent entretien, que dans 10 ans, ce métier n’existera plus sous la forme dans laquelle nous le connaissons. Ce qui ne veut pas dire pour autant que les compétences liées à ce métier deviendront inutiles, loin de là !

 

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